Alors que la question énergétique est au coeur des préoccupations françaises, le gouvernement doit présenter, ce mercredi 2 novembre en conseil des ministres, un projet de loi visant à accélérer l’édification de réacteurs nucléaires. Emmanuel Macron soutient la construction de six réacteurs EPR de nouvelle génération, avec une option pour huit autres.
La démarche s’inscrit dans le contexte où le besoin d’électricité va croître, alors que le pays doit s’extraire des énergies fossiles. En plus du nucléaire, le gouvernement veut également miser sur le solaire et l’éolien marin. Ce texte sera par la suite examiné à l’Assemblée nationale début 2023.
Ce mercredi, il sera présenté en conseil des ministres, en même temps qu’un projet de loi pour l’accélération du développement des énergies renouvelables commencera à être examiné au Sénat.
Le gouvernement prévoit d’installer ces EPR sur les sites de centrales déjà existantes. Les deux premiers seraient ainsi implantés à Penly (Seine-Maritime), d’autres à Graveline (Nord). La localisation de la troisième paire de réacteurs doit encore être déterminée : les sites du Bugey ou du Tricastin, dans la vallée du Rhône, sont envisagés.
Le projet de loi présenté ce mercredi doit permettre de «gagner du temps» en simplifiant les procédures administratives. Les sites seraient notamment dispensés d’autorisation d’urbanisme, car le contrôle de conformité serait assuré par les services de l’Etat. La construction de ces réacteurs relèverait en outre d’une «raison impérative d’intérêt public majeur», l’une des «conditions d’octroi des dérogations relatives aux espèces protégées».
Une «parodie de consultation»
Les travaux sur les bâtiments non destinés à recevoir des substances radioactives pourraient alors être réalisés avant clôture de l’enquête publique. Cela signifie qu’Emmanuel Macron pourra en poser la première pierre avant la fin de son mandat en 2027. Et ce, même si la mise en service du premier EPR n’interviendra pas avant 2035 voire 2037.
Le projet suscite néanmoins quelques réserves, y compris de la part du Conseil national de la transition écologique (CNTE), consulté obligatoirement pour avis, qui a «regretté les délais insuffisants» qui lui ont été laissés pour se prononcer.
De leur côté, les associations environnementales ont dénoncé un «passage en force sous de faux prétextes d’urgence à court terme». Alain Bougrain-Dubourg, de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) a déploré une «parodie de consultation» et l’absence d’étude d’impact du nucléaire sur «la faune aquatique et les mortalités massives d’oiseaux».
Un débat public en cours
En guise de réponse, le ministère a assuré lundi que ce projet de loi «ne préempte pas les concertations en cours ni les futures lois énergie climat qui décideront» in fine. Les parlementaires devront voter la stratégie énergie climat de la France à compter du second semestre 2023 et le gouvernement assure que, d’ici là, les Français pourront s’exprimer à ce sujet.
«Si nous voulons à la fois avoir une indépendance énergétique mais également tenir nos objectifs climatiques, il faut remplacer les énergies fossiles par des énergies bas carbone. Le nucléaire est aujourd’hui l’énergie le plus bas carbone de toutes les solutions dont nous disposons», a justifié vendredi la ministre Agnès Pannier-Runacher, à la centrale de Chinon (Indre-et-Loire). Avant d’ajouter : «Nous souhaitons avoir une adhésion des populations et des élus».
Un débat public sur la construction des six EPR, obligatoire pour le porteur de projet EDF, a en réalité déjà commencé le 27 octobre dernier. Il doit se poursuivre jusqu’au 27 février 2023.
A l’heure actuelle, la France dépend du nucléaire pour environ 70% de son électricité. En 2015, il avait été décidé de fermer 14 de ses 58 réacteurs afin de diversifier ses sources d’approvisionnement. Mais, fin 2021, Emmanuel Macron a changé de stratégie.